Origines
CAIREY-REMONNAY – Début XVIIe s. à Montlebon. Au XVIe s., de nombreuses familles Sire prennent des surnoms à Derrière-le-Mont, quartier de Montlebon, dans le Val de Morteau. L’une d’elles devient Sire-Cairey, puis Sire-Cairey-Remonnay. Finalement, au siècle suivant, le patronyme initial disparaît pour laisser Cairey Remonnay, et même très souvent Remonnay tout court dans les siècles suivants. Le 23 mai 1591, Guillaume fils fut Pierre Sire Cayrez, de Montlebon, et l’Anne Millon sa femme et l’Antoine3 Prenel, veuve de fut Girardot Sire Cayrez vendent à condition de réachat de six ans aux frères Fauche un meix situé à la Montagne de Montlebon, dit «Cernus au Nye» conte- nant environ vingt journaux pour la somme de six vingt dix francs (130 fr.). C’est justement au Cernaunier que l’on trouvera par la suite la ferme familiale reconstruite au XVIIIe siècle et la chapelle construite par l’abbé Remonay, curé des Fontenelles au XIXe siècle.1
Avant l’apparition du nom double
Les porteurs du patronyme REMONNAY sont nombreux en Franche-Comté, les CAIREY-REMONNAY eux aussi ne sont pas rares, et si l’on peut penser que les premiers ne seraient pas surpris d’avoir une origine commune avec les seconds, ils seront sans doute les uns et les autres étonnés d’apprendre que leurs ancêtres s’appelaient :
– SIRE au quatorzième siècle,
– SIRE JOLY au quinzième siècle,
– SIRE JOLY dit CAREY au début du seizième siècle,
– SIRE CAIREY à la fin du seizième siècle,
– SIRE CAIREY REMONNAY au début du dix-septième siècle,
– CAIREY REMONNAY depuis le milieu du dix-septième siècle jusqu’à l’époque contemporaine,
– REMONNAY pour certaines branches, à partir du dix-neuvième siècle.
Nous commencerons donc cette étude sur la famille CAIREY REMONNAY du Val de Morteau par quelques repères chronologiques sur les SIRE.
Le juin 1389 dans le plus ancien document nous donnant une liste de chefs de famille du Val de Morteau, tiré du Livre Noir, est cité Perrin li SIRE.
Le 22 décembre 1462 est nommé Girard SYRE.
On trouve aussi dans le Val de Morteau des COMTE et des ROY, et il semble bien qu’il faille y voir, comme dans d’autres régions d’ailleurs, des sobriquets dûs à l’esprit moqueur des habitants d’alors.
C’est en 1490 que nous pouvons localiser les SIRE dans le Val de Morteau grace à un compte de la Seigneurerie qui nous est heureusement parvenu. Tous les hommes de quinze à cinquante ans susceptibles de fournir la corvée de faux sont nommés par famille. On trouve cinq familles SIRE dans le Val, toutes installées dans le quartier de Montlebon.
1. Girard fils Perrot SIRE et son fils Jehan.
2. Girard SIRE JOLY et ses quatre fils, Girard, Pierre, Perin, et Guillaume.
3. Jehan fils de Guiot SIRE et trois fils, Jehannot, Jehan, et Antoine.
4. Antoine fils de Estienne SIRE;
5 Vuillemin SIRE et deux fils Vuillemin et Pierre.
On remarque qu’il a déjà paru nécessaire aux contemporains de distinguer deux Girard SIRE en formant le nom composé SIRE JOLY. On avait pris l’habitude de distinguer deux prénoms homonymes en précisant le nom du père, mais comment faire quand les pères possédaient le même prénom ? D’où la formule souvent utilisée par la suite dans le Val de Morteau consistant à accoler le nom de famille de la mère au patronyme paternel. Il se trouve que la famille JOLY est bien représentée dans le quartier de Montlebon, à Derrière le Mont, plus précisément (onze hommes sur les vingt cités) et on peut donc penser que Girard SIRE JOLY est fils d’une JOLY ou a épousé une JOLY.
Une trentaine d’années plus tard, c’est à dire environ une génération, dans un jet de 1517, sur quarante six « contribuables », on trouve quatorze SIRE dont Jehan SIRE QUARE, avec qui apparaît pour la première fois le surnom QUARE, que l’on trouvera le plus souvent orthographié CAREY, puis au siècle suivant CAIREY. On note aussi l’apparition des SIRE le PELIER et des SIRE de la FONTAINE.
Si le surnom PELIER, est sans doute dû à la profession de tanneur de ce Jehan SIRE qui le porta pour la première fois, si le surnom « de la FONTAINE » marque la localisation de Guillame SIRE de la FONTAINE, premier du nom, l’origine du surnom CARE est plus obscure. L’hypothèse la plus probable semble le mariage d’un SIRE JOLY avec une CARE. Il n’y avait pas de CARE au Val de Morteau, mais on les trouvait dans le Val de Vennnes, plus précisément à Grand Fontaine village limitrophe du Val de Morteau.
Nous noterons encore l’apparition vers la même époque des SIRE ROUGNON (marié à une ROUGNON), SIRE ROUSSOT (au cheveux roux), SIRE du RONDOT( de la ferme du Rondot), SIRE GREUX (?) et nous contenterons pour la suite de suivre les SIRE CAIREY.
Un censier commencé vers 1520 et qui fut utilisé pendant près d’un demi-siècle va nous aider à suivre cette branche.
Le folio 33 du quartier de Montlebon est consacré à Pierre fils de feu Pierre SYRE JOLY dict CAREY de Derrière le Mont.
L’intitulé est intéressant car ce Pierre SYRE JOLY dict CAREY est localisé à Derrière le Mont mais encore comptabilisé à Montlebon même. Or en 1523 c’est Jehan JOLY, beau-père de Pierre SYRE, qui paie pour lui et on a déjà vu que les JOLY sont bien implantés à Derrière le Mont. On comprend alors que Pierre SYRE JOLY « s’est marié gendre » à Derrière le Mont à cette époque, et c’est peut-être là qu’il faut voir l’installation des ancêtres des REMONNAY au Cernaunier.
Plutôt que de suivre année après année les « solvit », c’est à dire les « a payé », de tel ou tel membre de la famille, résumons par un tableau généalogique les renseignements apportés par ce document.
Première génération
Girard SYRE JOLY né vers 1450 de Montlebon
Deuxième génération
Pierre SYRE JOLY dict CAREY né avant 1475 mort avant 1523 de Montlebon.
Troisième génération
- Pierre ou Pierrot ° vers 1500 Ý avant 1561 de Derrière le Mont marié vers 1520 à Jehanette JOLY fille de Jehan
- Jehan
Quatrième génération
Enfants de Pierre et Jehanette
- Jacque
- la Jacque
- la Claude
- Claude
- Guillaume
Guillaume SYRE JOLY dit CAREY , appelé parfois Guillaumot, est cité pour la première fois dans le censier en 1561 comme fils de feu Pierrot CAREY; Pierrot CAREY est sans doute mort depuis plusieurs années, car depuis 1542 c’est toujours l’un ou l’autre de ses enfants qui règle les charges, voire d’autres encore, comme en 1547, où c’est Jehan fils de Besançon BALLANCHE, qui paie.
En cette fin de seizième siècle, les SYRE sont particulièrement nombreux, ou très mauvais payeurs, car sur cent-vingt excommunications pour dettes prononcées peu avant 1577 contre des habitants de Montlebon, dix-neuf concerne des SYRE soit près de 16 % . Il faut dire qu’à cette époque on excommuniait avec une facilité déconcertante et souvent pour des somme dérisoires, si bien que le Parlement de Dole diligenta une enquête en vue de réprimer ces abus, et c’est par cette enquête que nous est parvenue la liste des excommuniés du Val de Morteau.
Guillaume SIRE CARREY, fils de feu Pierre a sans doute lui aussi besoin d’argent, car le 23 mai 1590, par devant le notaire Boudot, conjointement avec Anne MILLON, sa femme, il vend à réachat pour six ans une maison à la Montagne de Montlebon, au » Cernuz au Nye » avec 20 journaux pour la somme de six vingt dix francs.
Cet acte qui nous est parvenu grâce au contrôle du lods, l’enregistrement de l’époque, est particulièrement important à plus d’un titre, pour l’étude de la famille REMONNAY avec la première mention du Cernaunier, berceau de la famille, où les SIRE CAIREY étaient donc déjà installés dès le milieu du seizième siècle.
Le fait que le toponyme « le Cernuz au Nye », ne se soit pas encore contracté en « Cernaunier » permet d’éclairer son étymologie. En 1389, dans la première liste d’habitants du Val de Morteau, apparaît Vuillemin le NYE. On sait qu’un cernu ou cerneu est un défrichement, comme au Cerneux Péquignot voisin, par exemple, et la tentation est donc grande de voir en ce Vuillemin le NYE, le défricheur de ce qui allait devenir le « Cernuz au Nye », puis au dix-septième siècle le Cernaunier.
Revenons à Guillaume SIRE CAIREY, qui avait vendu à réachat, c’est à dire avec faculté de le réacheter dans les six ans suivants, son meix du Cernaunier, ce qu’il fit sans doute, puisque le Cernaunier resta dans la famille.
C’est sans aucun doute ce même Guillaume SIRE CAIREY de Montlebon, qui fait un échange le 16 octobre 1548 avec Estienne et Jean FAUCHE. La lettre d’échange faite par devant le notaire MUSY, paraît encore assez importante à la famille CAIREY REMONNAY en 1706 pour être conservée dans les papiers de famille. On tient déjà dans cet acte un indice de l’identité entre CAIREY REMONNAY et SIRE CAIREY. On peut aussi penser que si les CAIREY REMONNAY, ont jugé bon de conserver un tel document, c’est qu’il était précieux, comme acte de propriété, mais aussi parceque le premier possesseur, Guillaume SIRE CAIREY était sans doute leur ancêtre.
Guillaume SIRE CAIREY vit encore en 1600, date particulièrement importante pour les habitants du Val de Morteau, c’est en effet cette année-là qu’ils sont affranchis solemnellement de la mainmorte par le Seigneur ecclésiastique. Guillaume SIRE CAIREY est encore en vie, il est le seul porteur du patronyme à Derrière le Mont et paie 8 F 12 pour l’affranchissement de sa communion.
Il disparaît sans dout au tout début du dix-septième siècle, et avec lui va bientôt sombrer dans l’oubli l’ancien patronyme SIRE, pour laisser la place à REMONNAY comme nous allons le voir dans le chapitre suivant.
Claude et Blaise CAIREY REMONNAY vivent en communion jusqu’au vingt-cinq juin 1647, date à laquelle ils partagent leurs biens devant le notaire Benigne GUYOT. Claude s’est marié deux mois auparavant et tient sans doute à mener ses affaires seul, espérant bientôt voir s’agrandir sa famille.
Mais Claude n’eut pas d’enfants de son mariage avec Marguerite BOURNEL. En effet, cette dernière rédige son testament le premier février 1689. Elle est dite veuve de Claude CAIREY REMONNAY et institue son frère Guillaume BOURNEL dit GAY, son héritier. Il est clair que si le couple avait eu des descendants, l’héritage de la mère ne serait pas allé à leur oncle; on n’en relève d’ailleurs pas trace dans les registres paroissiaux de Morteau. Claude CAIREY REMONNAY était sans doute mort depuis de nombreuses années. Il est parrain de son neveu Claude le 3 février 1662 puis n’appararaît plus. Quant à Marguerite BOURNEL, elle devait être déjà gravement malade lors de la rédaction de son testament, car la publication eut lieu le vingt mars 1689, peu après sa mort.
C’est donc à Blaise qu’advint la responsabilité d’assurer la postérité des CAIREY REMONNAY.
Quand il se marie le trois mars 1659 avec Claude BRUTILLOT DAMEY cette dernière a 23 ans. Une enquête de 1692 la donne alors pour laboureuse, veuve de Blaise CAIREY REMONNAY, âgée de 56 ans. Elle est donc née vers 1636, au début de la Guerre de Dix ans. Ses parents, Blaise BRUTILLOT DAMEY et Rose JEAN GIRARD s’étaient mariés par contrat, devant le notaire François ABRYOT le vingt-six octobre mille six cent trente trois. Claude BRUTILLOT fut l’unique enfant de ce mariage, sa mère Rose JEANGIRARD n’ayant pas survécu aux désastres de ces années terribles. Dès la guerre terminée, Blaise BRUTILLOT DAMEY, qui est encore dans la force de l’âge, se remarie avec Françoise JEAN GUYOT dont il aura au moins cinq enfants, dont Jean et Blaise, fondeurs de cloches réputés, qui fondent en 1689 le gros bourdon de 5960 livres de l’église.
Quand Blaise CAIREY REMONNAY est-il né ? Le fait qu’il n’est pas cité à la montre d’armes de 1632 laisse à penser qu’il est plus jeune que son frère Claude, qui s’est d’ailleurs marié douze ans avant lui. Comme son père est mort avant 1633 Blaise est donc né dans la période 1620-1630.
Ce n’est donc probablement pas lui mais sans doute un de ses proches parents, ce Blaise QUAIREY, du Val de Morteau, qui âgé de 56 ans en 1666, donc né vers 1610, a rétabli une arcade du pont de la ville de Baume en 1665. Pourtant Blaise CAIREY REMONNAY est sans doute charpentier comme le seront après lui ses fils.
De son mariage avec Claude BRUTILLOT DAMEY, il eut au moins dix enfants :
1. Marguerite née 1/10/1660
Parrain : Pierre ROY
Marraine : Marguerite BOURNEL
marié pc 4/07/1690 par devant Bertin, notaire, avec Antoine VERMOT GROSJEAN
2. Claude né 3/02/1662
Parrain : Claude CAIREY REMONNAY
Marraine : Claude Jeanne BRUTILLOT DAMEY
Sans doute mort en bas âge
3. Etiennette née 8/02/1664
Parrain : Antoine REUILLE
Marraine : Etiennette BORNEL
mariée pc 28/10/1695 reçu de Vernier, notaire, avec François ROUSSEL BOSSON
4. Blaise né ca 1666, Ý 1706 Charpentier
5. Blaise (a) née1668
mariée pc 16/07/1703 reçu de Vernier, notaire, avec
Antoine BOISTON fils de Claude de Derrière le Mont.
6. Claude né ca 1670, Ý 1725
marié pc 15/08/1714 devant Reuille, notaire, avec Jeanne PRENEL
7. Claude Joseph né 4/11/1673,
Parrain : Claude SYRE
Marraine : Françoise HUMBERT PRENEL
marié Jeanne BOILLOD
8. Adrienne née 3/10/1675
Parrain : Blaise DAMEY
Marraine : Adrienne ROUGNON
marié pc 26/01/1700 reçu de Vernier, notaire, avec Etienne MOYSE PHILIBERT
9. Pierre Antoine né 3/04/1678
Parrain : Pierre ROUGNON
Marraine : Antonia BORNEL
Sans doute mort en bas âge
10. Blaise Antoine né 19/03/1679, Ý avant 1706
Parrain : Blaise FEUVRIER
Marraine : Jeanne ROUGNON
Le dix-neuf mai 1682, Blaise CAIREY REMONNAY achète une terre pour trois cents francs à Antonia VERMOT GROS HUGUENIN. Le contrat est signé devant le notaire Vernier. Et le même jour l’acheteur vend une rente pour le prix de l’acquisition au vendeur. L’achat est fait à crédit en quelque sorte.
Il meurt dans la décennie suivante, sa femme étant veuve en 1692. Sans doute est-il d’ailleurs déjà mort en 1691, car le vingt huit mars 1691 Clauda BRUTILLOT DAMEY, mère de Blaise, Claude et Claude Joseph, achètent une terre à Demoiselle Charlotte ROY et au Sieur Capitaine FAUCHE son fils pour le prix de dix neut cent soixante sept francs. C’est un achat conséquent. Peut-être les fils, une fois le père disparu, ont-ils l’intention de « voir plus grand » ?
- Christian Monneret, Histoire des noms de famille du Haut-Doubs, Editions du Château, 2020 ↩︎