Les origines de la famille Mercier des Plans
MERCIER-des-PLANS – 1589 à Montlebon, où les Mercier-des-Plans se sont d’abord appelés Guyot Mercier, puis Guyot-Mercier-des-Plans et à la veille de la Révolution s’appelleront pour certains simplement Desplans. Cette famille apparaît à Chinard, hameau de Montlebon, à la fin du XVIe siècle. Elle doit son nom au meix « Les Plans », de Chinard, sur laquelle elle était installée. La famille, une des plus riches du village, est ravagée par la peste en 1635. Seul un fils survivra, dont le descen- dant Claude-François Mercier-des-Plans, né en 1746, d’abord maître sculpteur à Laon, en Picardie, reviendra s’installer à Morteau après son mariage.1
La famille Guyot-Mercier-des-Plans de Chinard, à Montlebon, Val de Morteau2
Les Origines
L’étude de la famille GUYOT MERCIER DES PLANS dans le val de Morteau est intéressante à plus d’un titre.
Le patronyme nous réserve bien des surprises de par son extrême variabilité d’une époque à l’autre et rechercher ses occurences dans le temps à travers les archives n’est donc pas simple.
La plus ancienne liste de chefs de famille qui nous soit parvenue, date de 1389. On trouve alors un Vuillame GUIOT.
En 1434 apparaissent : Guiot MERCIER, Jehan MERCIER, Jehan GUIOT, Guillemin GUIOT, Regnaut GUIOT.
En 1462 les différentes branches des GUIOT sont sans doute déjà difficiles à distinguer, car apparaissent les premiers noms doubles. C’est un fait remarquable, car dans le Val de Morteau, c’est près d’un siècle plus tard que l’on verra se généraliser les noms composés.
Sont cités : Jehan GUIOT, Jehan GUIOT JEHANNIN, Besançon GUIOT JEHANNIN, Besançon GUIOT, Besançon GUIOT GIRARD, Perrin MERCIER.
Le Livre Noir est précieux pour l’histoire des familles du Val de Morteau, car il est le seul, dans l’état actuel de nos connaissances, à nous livrer des listes d’habitants. Cependant ces listes ne sont pas exhaustives et elle ne situent pas les habitants dans leurs quartiers respectifs.
Il faut attendre 1490 pour trouver un document donnant un état des habitants par quartiers et mieux encore par famille dans chaque quartier. C’est un compte du Val de Morteau qui nous est parvenu, sauvé sans doute de la destruction par le rôle particulier qu’il a joué dans l’histoire du Val. Il servit en effet au début du seizième siècle de preuve dans la démonstration que voulait faire le Seigneur de Morteau, c’est à dire le Prieur, de l’appartenance du Quartier des Brenets à sa juridiction.
Fait partie de ce compte l’état de tous les hommes du Val de Morteau en âge de faire la « corvée de fal », c’est à dire âgés de quinze à cinquante ans.
On peut faire confiance aux autorités de l’époque sur le caractère exhaustif de cet état.
On trouve les GUIOT-JEHANIN installés Chez Rossignier, quartier de Grandcombe, où ils représentent environ le tiers des habitants, six familles sur dix-huit nommées.Ils y sont encore nombreux au siècle suivant, et on peut d’ailleurs noter que le patonyme est encore bien représenté actuellement en Franche-Comté sous sa forme moderne de GUYOT-JEANNIN.
Les GUYOT-GIRARD, quant à eux, sont installés à La Moilleseuille, autre quartier de Montlebon d’où ils auront disparus à la fin du seizième siècle pour s’installer à Chinard.
On trouve alors essentiellement des GUIOT dans deux quartiers du Val, Montlebon et Chinard.
A Montlebon un seule famille GUIOT, particulièrement nombreuse d’ailleurs, avec treize hommes de quinze à cinquante ans, soit si l’on compte autant de femmes et filles, les enfants de moins de quinze ans et sans doute quelques adultes de plus de cinquante ans, une communion dépassant certainement trente personnes .
Voici cette communion telle qu’elle apparaît dans le registre :
- Othenin GUIOT
- Girard son frère
- Jehan genre7 Girard
- Othenin fils dudit Othenin
- Girard autre fils
- Perrin autre fils
- Henry autre fils
- Guillaume autre fils
- Jacquot neveu de Othenin
- Vuillemin son frère
- Jacque son frère
- Symon neveu d’Othenin
- Guillaume son frère
On trouve aussi des GUIOT dans le quartier de Chinard, deux familles exactement, et c’est particulièrement intéressant, car c’est sans doute là qu’il faut chercher le berceau des GUYOT MERCIER.
La famille de Besançon GUIOT VUILLEMIN avec :
Guillaume, Othenin, Jacobot et Claude ses fils d’une part et Claude fils de Jehan GUIOT VUILLEMIN d’autre part.
La famille de Besançon GUIOT avec :
Jehan, Perrin, Symonin, Girard, Guillemin et Pierre ses fils;
Guillaume fils de Jehan GUIOT et Jehan fils dudit Perrin.
Les différentes branches GUYOT MERCIER étant toutes localisées à Chinard à la fin du seizième siècle, c’est donc probablement dans la famille de ce dernier Besançon GUIOT qu’il faut chercher celui qui prenant pour épouse une MERCIER allait ainsi être à l’origine de la branche GUYOT MERCIER.
C’est au milieu du seizième siècle que l’on rencontre pour la première fois le patronyme.
En effet, le 13 mai 1537 Girard MERCIER fils de Jannerot MERCIER de Chez Ynnard et Guillaume SIMON, son gendre, se font accenser à titre perpétuel, par le prieur Seigneur de Morteau, » une place et chazaux scise et contigue le ruisseau et court d’eau de Derrière le Mont [É], sur le rupt et court d’eau appartenant audit Girard et ses consorts, héritiers dudit feu Jeannerot Mercier, scis au lieu en Loyedé,[É], pour en cette place et chazaux, faire et construire une maison et tant en icelle que sur ledit rupt court d’eau mettre et tenire engins, roües et autres utiles nécessaires pour rasser bois, et battre chénevé en icelui, avec puissance et faculté de tant pour eux que leurs hoirs ou ayant cause et tous autres dudit Morteau et étrangers, rasser bois et battre chénevé, et [É] pour et moyennant la cense ou rente perpétuelle de cinq sous estevenants [É] le jour de fête Saint Martin . »
Un autre acte d’accensement apporte d’utiles précisions :
» Nous François de Viry, protonotaire du Siège apostolique, commendataire et administrateur perpétuel du prieuré et Seigneurerie de vau de Morteau, scavoir faisons à tous que, nous, pour nous et nos successeurs prieur et Seigneur dudit Morteau, avons traité et accensé par ces présentes, baillons et accenssons purement et perpétuellement à Guillaume Simon, Alexis Mercier et Antoine Guyot Mercier fils de feu Girard Guyot Mercier, son beau frère du Village de Chinard, audit vau de Morteau, communs en bien, présents et stipulans et acceptans, pour eux, leurs hoirs et ceux qui d’eux auront cause au temps avenir, une place de terre étant en notre seigneurerie du vau de Morteau, au lieu dit Les Roches Boillod, jusqu’à l’endroit de Chez Moutallier, sur Leaudez, laquelle eau Leaudez, fait tourner et moudre un moulin de Derriere le Mont et Cornabez, ensemble le court d’eau que tire par le Bief de Leaudez pour et en ladite place, lesdits Guillaume Simon et Antoine Guyot Mercier, leurs hoirs, faire édifier et construire un moulin sur le cour d’eau deja autrefois accense à feu Jeannerot Guyot Mercier et dont lesdits Guillaume Simon et Antoine Guyot Mercier ont droit avec autres leurs personnes en devers et du côté du Soleil Levant d’iceluy, auquel moulin ne sera permis ny loisible moudre aucun habitant dudit Morteau, ny ledit Guillaume Simon et Antoine Guyot Mercier, ny leurs hoirs, sinon sous peine de l’amende de soixante sous estevenants toutes et quantes fois qu’ils seront trouvés ainsy faire, réservés ceux leurs dits hoirs et ceux que dessus auront cause, et aussy les étrangers, et aussy ceux dudit Morteau, y pourront moudre leurs écorces si bon leur semble et ce pour et moyennant la cense annuelle et perpétuelle d’une émine de froment payable par lesdits Guillaume Simon et Antoine Guyot Mercier et leurs hoirs un chacun an et à nous et à nos successeurs, prieur et Seigneur dudit Morteau au jour de fête nativité notre Seigneur sur peine de trois sous estevenants d’amende et commencera le premier terme toutes et quantes fois que ledit moulin sera construit et réédifié, comme aussi moyennant la somme de huit écus d’or, que pour ce nous avons eu et recu desdits Guillaume Simon et Antoine Guyot Mercier, et pour une fois et dont nous nous sommes tenus et tenons pour contents et au cas que lesdits Guillaume Simon et Antoine Guyot Mercier deffaudraient de payer ladite cense d’une émine de froment par trois au continuel à nous et à nos successeurs, ledit moulin nous sera commis de plein droit, et avons promis et promettons, en foy de prelat, ledit accensiment entretenir, garder, maintenir, garantir et défendre envers et contre tous, sans jamais aller ne venir au contraire tacitement où en apparence, en témoignage de vérité desquelles censes nous avons signé cette de notre nom et sein manuel et fait sceller de notre scel et avec ce fait signer par Pierre Faget, notaire publique juré des tabellions du Baillage d’Aval, notre secrétaire es mains duquel nous avons passé les présentes, sous le scel de l’empereur notre sire pour la corroboration d’icelui, sauf notre droit et l’autruy, audit Morteau, le onzième jour du mois de juin 1551, présent Maurice de la Croix de Savoye et Huguenin Regnaud de Morteau, témoins à ce requis, ainsi signé, François de Viry et par ordonnance du Seigneur du scel dudit seigneur à queue pendante. «
On peut donc suivre à travers ces deux actes trois générations de GUYOT-MERCIER.
Le premier, sans doute tige de tous les GUYOT MERCIER de Chinard à construit un moulin à Louadey au début du seizième siècle. Il est déjà mort en 1537, date à laquelle son fils Girard GUYOT MERCIER et le gendre de ce dernier Guillaume SIMON, le reconstruisent.
Ce Girard MERCIER, dont une fille est mariée à Guillaume SIMON est certainement âgé d’environ cinquante ans, il est d’ailleurs mort avant 1551, ils est donc né un peu avant 1490.
On peut donc dresser suivre trois générations de la manière suivante :
Première génération
Jeannerot GUYOT MERCIER, Ý avant 1537
Deuxième génération
Girard GUYOT MERCIER ° ca 1490, Ý avant 1551
Troisième génération
- Antoine GUYOT MERCIER qui vit en 1551 marié à Guillaume SIMON
Il n’est pas possible, dans l’état actuel de nos connaissances, de relier ces premiers GUYOT MERCIER à ceux de la fin du seizième siècle, devenus si nombreux à Chinard, qu’ils doivent vers 1600 prendre un nom triple pour se distinguer les uns des autres comme le montre le document suivant.
Le 20 juillet 1605 Jean LECLERC, notaire, procède à la vente aux enchères au bénéfice des enfants pupilles, Pierre et Claude GUYOT MERCIER PEGUOT, des meubles de la succession de feu Claude GUYOT MERCIER DIT PEGUOT.
Les plus proches parents, réunis en conseil de famille sont présents, à savoir :
– Jacqua BONZON, la veuve;
– honorable Guillaume GUYOT CAIGNON;
– Antoine MERCIER PEGUOT (frère du défunt) ;
– Claude MERCIER MOUROT;
– Jehan GUYOT MERCIER GAILLARD;
– Claude GUYOT MERCIER DES PLANS qui est choisi comme tuteur.
Il est d’ailleurs intéressant de regarder d’un peu plus près le détail de cette « délivrance au plus offrant et dernier enchérisseur, des meubles, bestiaux et fruits dépendant de l’hoirie « . En effet, nous avons là une description des meubles possédés par un laboureur aisé du Val de Morteau au début du dix-septième siècle, et c’est sans doute une des rares, sinon la seule qui noUs soit parvenue.
Voici donc le détail :
Les meubles vifs.
– une jument sur poil blanc, son poulin masle menant mise à prix 90 F ;
– une autre jument sur poil bay mise à prix 100 F;
– une autre jument sur poil noir;
– une autre jument sur poil bay;
– une génisse de deux ans à poil rouge;
– une vache sur poil faulx;
– une vache rouge;
– une génisse d’un an;
– un pourceau;
– 16 têtes de brebis;
– 3 mères brebis;
– une vache sur poil faulx.
Les meubles morts.
– 1 arquebuse, le canon d’icelle de la longueur de 13 tours à 6 F;
– 1 autre arquebuse à 4 F;
– 1 pistolet à 30 gros;
– 1 chapeau de feutre noir à 3 F;
– 1 manteau de drap noir doublé de serge rouge à 5 F;
– 1 autre manteau de drap tanné à 2 F;
– 1 gresgue de drap à 30 gros;
– 1 pourpoin de taille blanche à 20 gros;
– 1 autre pourpoin à 8 gros;
– 1 casaque à manches coupées assez vieille à 12 gros;
– 1 bas de chausse de drap fauve à 8 gros;
– 1 autre bas de chausse à 14 gros;
– 1 aulne de serge vert non mis en oeuvre à 3F;
– 1 vieille casaque de serge donnée à Jehan Mercier Gaillard;
– 1 lit, 1 coussin, 2 oreillers de plume, pesant environ 43 livres à 6 gros;
– 1 livre et demie de bourre de plume à 12 gros;
– 1 autre lit de vieille plume;
– 1 linceul de grosse taille laissé à la veuve;
– 2 assiette et 1 écuelle d’étain à 15 gros;
– 1 chandelier de laithon à 6 gros;
– 1 pot en étain tenant 1 pinte à 9 gros;
– 1 bassin de laithon à 3 gros;
– 2 pouchoires, 1 de laithon, 1 de fer à 7 gros;
– 1 pot de cuyvre à 2 F;
– 1 cassotte de laithon à 4 gros.
Il faut encore ajouter aux meubles 7 capitaux de rente pour un total de 754 F, ce qui montre que Claude GUYOT MERCIER PEGUOT disposait d’assez de numéraire pour faire quelques prêts.
La veuve, Jacqua BONZON, se remariera une troisième fois après le décès de Claude GUYOT MERCIER PEGUOT , avec Jean JACQUIER dont elle aura deux filles Françoise et Antoinette, qui seront plus tard en procès avec leurs frères utérins ce qui explique pourquoi le procès verbal de la vente aux enchères de 1605 nous soit parvenu.
On aura noté que le tuteur des pupilles se nomme Claude GUYOT MERCIER DES PLANS. Or ils se trouve qu’en 1589, dans un censier du Val de Morteau, apparaît pour la première fois le patronyme GUYOT MERCIER DES PLANS, en la personne de Claude fils de feu Pierre GUYOT MERCIER DIT DES PLANS de Chynard.
Ce Pierre GUYOT MERCIER , mort à Chinard avant 1589, est à l’origine du patronyme GUYOT MERCIER DES PLANS; il était propriétaire d’un meix « aux Plains » de Chinard et ses contemporains, pour les distinguer de ses frères ou des ses cousins, ont ajouté à son nom le nom de son domaine.
Son fils Claude est ce même Claude tuteur des pupilles GUYOT MERCIER PEGUOT en 1605, ce même Claude dont il va être parlé dans la suite de cette étude.
Claude Mercier des Plans et la peste au Val de Morteau
Le nom de Claude GUYOT MERCIER DES PLANS va rester lié à un moment particulièrement tragique de l’histoire du Val de Morteau.
Monsieur Truchis de Varennes, dans son monumental ouvrage sur le Val de Morteau, parlant de l’apparition de la peste écrit « elle y fit ses premiers ravages pendant l’été de l’année 1639. Sa première victime dans le Val de Morteau fut un nommé Desflans qui en mourut à la Grand Ville peut avant le départ des Suédois ». Or l’auteur, rapporte cet événement d’après une relation d’un autre historien du Val, Routhier. D’après quelles sources ? On peut se demander s’il ne s’agit pas d’une tradition orale, ce qui expliquerait la déformation du patronyme et, comme nous allons le voir, l’erreur de date, facilement expliquable d’ailleurs, car dans la mémoire collective, toutes les calamités se retrouvèrent contemporaines des Suédois.
La mort de peste de Claude GUYOT MERCIER DES PLANS fit en effet l’objet de deux procès et si les minutes des procédures d’enquête des juridictions inférieures, justice seigneuriale de Morteau et justice du Baillage de Pontarlier, ont disparu dans la tourmente de la guerre de dix ans, celles du Parlement de Dole nous sont heureusement parvenues.
Le premier procès fut intenté contre Pierre MERCIER PEGUOT en tant que tuteur de Jean François fils et héritier de furent Claude GUYOT MERCIER DES PLANS et Blaisa MYOTTE par Guillaume BINETRUY, Claude BILLOD, Joseph BARBE, Roze GRAND-GUILLAUME , Guillaume JACOUTOT et Claudine DODANE .
Ces derniers ne semblent pas avoir été entièrement payé du nettoyage des maisons de Claude Mercier de Plans pour cause de peste, du traitement de la veuve de Claude Mercier des Plans, Blaisa MYOTTE et de leur fils Jean François, et enfin du transport des corps au cimetière des pestiférés.
Le 12 avril 1633, un enquêteur de la Cour Souveraine du Parlement de Dole est à Chaillexon, Val de Morteau pour interroger les témoins de la partie plaignante.
Nous laisserons les témoins raconter eux mêmes l’apparition de la peste dans le Val de Morteau, tant leurs dépositions sont intéressantes sur le fond comme sur la forme.
Honorable Jean MERCIER, notaire de Chinard, âgé d’environ soixante sept ans est le premier témoin.
Laissons lui la parole:
« En l’an mil six cent trente et un il estait eschevin au lieu de Chinard aud. Val de Morteau, et se souvient que lors que led. village fut affligé de peste que fut en lad. année et au commencement du mois de juillet, l’on se donna garde que la maison de Claude Mercier, estait fort suspecte et dangereuse en ce que trois ou quatre personnes estaient morte en lad. maison avec peu d’intervalle, mesme led. fut Mercier en mourut à ce que l’on tient, encor qu’il fut enterré solemenellement et un sien filz, mais comme ses deux filles tombèrent malade, led. déposant estant en la charge d’eschevin voulut scavoir la cause de telle maladie et pour ce faire envoya Mre Pierre Barbier de la Grand Ville de Morteau chirurgien, lequel les ayant visitées, fit rapport aud. déposant que c’estait un mal contagieux, pour ce que, luy led. déposant y voulut mettre l’ordre nécessaire pour le nestoyement de lad. maison et traictement des malades et manda à cest effet lesd. produisants que l’on disait estre gens bien experts et entenduz pour led. faire, et ayant led. déposant parlé à iceux produisants, ne fit aulcun marchez avec eux, seulement leur dit ce qu’ilz deussent entrer en lad. maison et qu’ilz seroien bien salariez, saufz que led. Claude Billoz coproduisant dit qu’il savait d’aultres nestoyeurs qui avoient prins pour leur peine et parfum six vint francs, et qu’il se contenterait de cent et dix pour entreprendre Jean François Mercier filz dud. fut Claude Mercier, et se souvient luy led. déposant qu’il les luy accorda, ne scayt s’il en a este payé ou non, moins les aultres coproduisants aussy de leurs peines. Bien dit qu’ilz se sont bien acquitez de leurs debvoirs, tant au nestoyement de la maison qu’a porter les corps mortz en terre, leur ayant veu faire leur office parceque comme sa maison fut aussy atteinte du mal et estant envoye aux loges, dez icelles il voyait lesd. produisants porter les corps morts en terre et au lieu destiné pour les pestiferez et ne pourrait luy deposant estimer telles peines, s’en rapportant a ceux qui ont plus de cognoissance de telles affaires qu’il n’a É»
Et le second témoin, Pierre fils d’Outhenin Freschot des Frenelots, masson, va précisément nous donner les tarifs pratiqués à l’époque pour ce genre de besogne, ce qu’il sait de
« tant mieux.pour aultant qu’il a servy aud. village de nestoyeur ».
D’abord le prix des soins :
« comme Blaise Myotte femme dud. Claude Mercier au subject de quoy elle fut portee aux loges, et mise en la garde de Roze Grand Guillemin coproduisante, laquelle la traicta et soulagea par un assez long temps et ne demeura que quelques jours en sa loge qu’elle mourut et juge que les salaires de lad. Roze peuvent valoir vingt francs ».
Puis le prix de l’enterrement :
« laquelle Blaise Myotte fut portee en terre par Guillaume Bieneltruz aussy coproduisant dez lad. loge au cimetierre destiné pour les pestiferez, il y avait un chemin d’environ une heure en sorte qu’icelluy Bienetruz eut beaucoup de peine, d’autant qu’il la portait sur ses espaules comme led. déposant le vit et estime telles peines a la somme de quarante francs et n’en eut voulu faire autltant a moindre prix ».
Le nettoyage de la maison :
« et quant au nestoyement des deux maisons dud. fut Mercier sizes aud. village de Chinard, il estime chasque maison a cent francs, une portant l’autre que sont deux cent francs, en consideration d’une grande quantite de meubles que s’y retreuverent, bestiaux et fourrage, en quoy il falllait beaucoup de peines et ne les eut voulu nestoyer a moindre prix desd. deux cent francs, sachant bien que lesd. Bienetruz et Roze Grand Guille ont fait led. nettoyement, en ce que luy qui depose fit visite desd. maisons pour scavoir si le tout estait bien repurgé et nestoyé, et recogneu le tout estait bien faict ».
Et enfin le traitement de Jean François MERCIER DES PLANS fils de feu Claude, soigné de la peste pendant un mois dans sa loge par Claude Billaud, et qui valait bien cent dix francs.
Le troisième témoin, Pierre fils de Jean DELIF ROUSSEL du village des Gras, cordonnier âgé de d’environ trente six ans précise que :
« Roze Grand Guillaume coproduisante que si elle a traicté six jours durant la femme dud. Mercier estant aux loges ses peines peuvent valloir quarante solz par jour que sont douze francs pour lesd. six jours ».
Il confirme que ne nettoyement des deux maisons valait bien deux cent francs « en consideration mesme qu’il y pouvait avoir beaucoup de meubles en lesd. maisons pour aultant que iceluy fut Mercier estait fort riche, et des plus commodes dud. val de Morteau ».
Le quatrième témoin est Pierre fils de fut Pierre GUYOT CERNU de Chinard, âgé de vingt et un ans.
Il explique que la peste arriva à la maison de son père qui en mourut, et que tous ceux de la maison furent mis aux loges, lui étant du nombre et il se souvient que peu avant il vit nettoyer les deux maison Mercier des Plans « les ayant veu mettre des lits de plumes sur le toit de lad. maison et plusieurs autres meubles pour les essuirer ».
On constate que l’on pouvait sortir facilement des loges :
« lorsqu’il fut aux loges s’allant esgayer d’un costel et d’aultre, mesme jusque dans les bois et auprès d’une maison qu’appartenait aud. fut Claude Mercier, icelle dite de La Chaux ».
Le sixième témoin est Claude MERCIER MOUROT, de Chinard, tailleur d’habits âgé d’environt vingt ans.
« estait d’un costel et d’autre a travailler de sa profession de tailleur, meme ayant sceu telle contagion, il s’achemina pres dud. village pour trouver le testament de sa mère, et se fit faire une loge pour y faire une quarantaine crainte l’on ne le voulut recepvoir aux villages voisins, et se souvient que pendant qu’il estait en lad. loge, s’allant esgayer d’un costel et d’un autre, il remarqua que l’on avait fait deux loges assez pres du village et sur le meix dud. fut Claude Mercier »`.
Le septième témoin est Jantot GIRARD GUYOT, de Chinard, laboureur, âgé d’environ quatre vingt deux ans et feu Claude MERCIER DES PLANS était son neveu.
Le huitième témoin est Guillaume GAUTHIER ROY de Montlebon, laboureur âgé d’environ soixante quatre ans.
« É les loges dud. Chinard estaient posées et entre aultres, il y en avait une du fils de fut Claude Mercier, jeune enfant que l’on disait être atteint de lad. maladie, et lequel estait en la garde de Claude Billaud dit Vuillemin produisant, et souventes fois parla a eux deux, s’informant de leur pourtement, et disait led. Billaud qu’il avait en charge led. enfant avcec il prenait beaucoup de peine et que ne l’abandonnait en aulcune façon parceque c’estait un enfant riche ».
Le neuvième témoin est Nicolas MERCIER, fils de Maître Jean MERCIER, notaire, âgé d’environ vingt cinq ans.
« sachant aussi qu’iceluy Billaud et Joseph Barbe coproduisants ont nestoyé un des maisons dud. fut Claude Mercier, qu’est celle dicte de La Chaux, et qui est sur la Seigrie du prince de Longueville, et laquelle fut nestoyée par deux fois, la première par led. Barbe, mais comme l’essayeur mourut ledit Billaud y mit la main ».
Le dixième témoin est Pierre Girard Guyot, de Chinard, laboureur, âgé d’environ vingt huit ans.
« Pierre Mercier défendeur ceste part, et luy déposant eurent charge de la communaulté pour mettre ordre a la maladie de contagion de laquelle estait affligé le village de Chinard, en sorte que comme ils apprindrent que l’une des maisons dud. fut Claude Mercie qu’est celle dite de La Chaux, estait infestée de peste, et qu’il y estait mort des personnes, luy led. déposant marchanda a Joseph Barbe coproduisant a la somme de quatre vingt francs pour nestoyer lad. maison, mais comme led. Barbe fut au devant d’icelle maison, et ayant apprint qu’il y avait deux corps morts, luy dit qu’il ne voulait entrer en lad. maison pour led. quatre vingt dix francs, et qu’il ne voullait tenir a faire led. marchez, ains voulait quarante escuz, lesquels luy furent a l’instant accordés ».
Le onzième témoin est Claire DODASNE fille de fut Othenin DODASNE, du Villard, âgée d’environ vingt quatre ans.
« fut présente lorsque led. Guillaume Bienetru porta en terre lad. veuve dud. Claude Mercier et la mit sur ses espaules, et la porta jusque en la place destine pour enterrer ceux morts de peste, et y avait une bonne distance de l’un des lieux a l’aultre, en sorte que led. Bienestru en fut grandement incommodé et se plaignait fort lespaule et une cuisse, et semblait qu’il en fut estropie, sachant aussi que lad. Roze Grand Guillaume ayda a enterrer une premiere fille que mourut de peste en la maison dud. fut Mercier, lad. deposante presente qui de mesme ayda a l’enterrement de Pierre Humbert , grangier dud. fut Claude Mercier aussy mort de peste »
Les douzième et treizième témoins sont un soldat et un chirurgien de Dole, qui ont servi de nettoyeurs dans leur pays et précisent que lorsque le mal reprend dans une maisons et que ce n’est pas la faute des nettoyeurs, le deuxième nettoyage est toujours dû.
Le quatorzième témoin est Jean MERCIER, fils de Jean MERCIER de Chinard, demeurant à Dole où il est clerc juré au greffe de la Cour, âgé d’environ vingt un ans et il confirme les déclarations des témoins précédents.
Un deuxième procès nous est connu par une enquête 2 du 29 décembre 1633. Elle a lieu à la requête de Jean MERCIER, notaire, contre Pierre MERCIER PEGUOT tuteur de Jean François MERCIER DES PLANS. Il réclame des dommages et intérets pour l’argent qu’il a perdu pendant le temps qu’il a été confiné dans une loge et n’a pas pu exercer sa charge de notaire.
Le témoignage de Pierre BARBIER, chirurgien, âgé d’environ 30 ans, second témoin est particulièrement intéressant :
« un certain mardi du mois de juillet 1631, luy estant advis que c’estait le premier jour du mois, il fut mandé par Maître Jean Mercier coproduisant, qui estait pour lors échevin au quartier de Montlebon, d’où dépend le village de Chinard, et où il fait sa résidence, pour voir une fille de Claude Mercier Des Plans qui estait morte et reconnaitre dequelle maladie elle estait décédée; il alla avec Nicolas Mercier, fils du produisant en la maison de fut Claude Mercier Des Plans, ayant fait appeler la femme dudit Mercier Des Plans, et fait venir sur la porte de la maison et interrogé icelle de répondre s’il n’y avait point de corps morts en sa maison, icelle lui répondit qu’oui et qu’il y avait une sienne petite fille décédée la nuit précédente et l’ayant fait apporter au devant de la maison , ledit déposant la visita d’assez près, et tant par les marques qu’elle avait sur le corps et en divers endroits, que véritablement elle estait morte de peste; interrogea s’il y avait d’autres malades en la maison, elle dit qu’une autre fille, la fit venir, elle avait un bubon ou charbon a la poitrine selon qu’il recogneut; ce fait le déposant se transporta au lieu de La Chaux, pays de Suisse, en une maison appartenant a Claude Mercier Des Plans, du moins au devant d’icelle, d’où il sortit une servante, laquelle sur les interrogations a elles faites, répondit qu’il y avait deux malades en icelle, que l’on fit venir, l’un avait la peste et l’autre qui décéda s’appelait Antoine Humbert Prenel dit le Busson; la servante dit que Jean Mercier fils dudit Claude Mercier Des Plans estat deja décédé auparavant, qu’il avait une bosse a l’aineÉ»
Le troisième témoin est Claude BILLOD SYMONOTTE, du Villard, laboureur, âgé d’environ 40 ans.
Il fut appelé le quatre juillet 1631 pour traiter Jean François Mercier Des Plans de la maladie de contagion et Blaise Myotte mourut pendant qu’il était aux loges à traiter dedit Jean-François.
La vingtaine de témoins cités à l’enquête relatent des faits déjà racontés dans l’enquête précédente.
Notons le témoignage du vingt-troisième témoin, honorable Guillaume VERMOT-GROSJEAN, coéchevin, qui dit que Claude MERCIER DES PLANS était le plus riche du village, étant imposé à 26 F alors que le suivant ne payait que 16 F, et laissait à sa mort plus de trente mille francs.
On possède la contre-enquête relative à ce deuxième procès, c’est à dire la production des témoins à décharge par Pierre Mercie Pegot.
Cette enquête a lieu à Morteau, le tiers du mois de janvier de 1634.
Le deuxième témoin est à nouveau Maître Pierre BARBIER, chirurgien;
« il aurait esté a diverses fois visité feu Mre Claude Mercier des Plans, au commencement de la maladie dont il mourut, pour luy tirer du sang, ainsi qu’il aurait faict a deux de ses filles qui estaient ja malades, aucune fois il ne recogneu en aucune façon que ce fut peste, sinon lors qu’il fut une fois mandé que fut la dernière qu’il entra en lad. maison a l’effet de luy appliquer quelques remedes y contenus en une lettre missive que la fille Couthet, appothicaire luy avait addresse ensemble d’une ordonnance du Sieur Francois, docteur en medecine a Salins, et depuis qu’il se transporta au devant de la maison dud. fut Desplans, environ sept ou huit jours après sa mort, accompagné du fils dud. défendeur, nommé Nicolas, lequel le vient advertir avec le Sieur Marc Gaulard, coeschevin aud. Morteau, pour visiter la dernier décédée des filles dud. Desplans selon qu’il fit et recogneut qu’elle estait morte de peste et par apres alla en divers aultres quartiers dud. Chinard, mesme a la Chaux et aux Rosieres, ou il recogneut quattre ou cinq malades de la contagion, d’ou retournant pour en faire son rapport aux sieurs eschevins de la Grand Ville de Mortaulx assembles lors en la maison dud. Marc Gaulard avec plusieurs aultres eschevins des quartiers du Val du lieu, il leur fict entendre que lad. fille estait morte de peste et ceux qu’il avait visité es lieux cy dessus en estaient atteint, de quoy ayant esté led. produisant reprins et tancé par les eschevins, il leur dit que ce n’estait pas de la peste [É], et assure aussy led. deposant que led. Mercier défendeur ceste part, lors qu’il s’en revient avec luy dud. Chinard apres lad. visite faicte le requiera diverses fois pendant le chemin de ne point dire que lad. fille estait morte de peste, luy disant pour l’amour de Dieu, de ne le dire jusqu’a ce qu’elle fut enterrée ».
Le troisième témoin est Cleriadus GIRARDOT, eschevin de la Grand Ville de Mortaulx, âgé d’environ cinquante ans.
« au temps de la maladie de laquelle fut Claude Mercier Des Plans, père du produisant, décéda au lieu de Chinard, il y courait une fiebvre en divers endroits du Val dud. Mortaulx, dont l’on jugeait et tenait communement que led. feu Desplans estait atteint, aussy durant qu’il fut malade, plusieurs personnes l’auraient este visiter et fut iceluy enterré solemnellement en la place que luy appartient au cimetiere dud. Mortaulx ou led. deffendeur assista entre aultres, que fait croire aud. sieur deposant que s’il eut jugé que ce fut esté de peste, il n’eut assiste qud. enterrement, ainsi au contraire, comme il estait coeschevin du quartier de Montlebon duquel deppend led. Chinard, il eust plustot procédé a la barre de sa maison et tenu les ordres de police en tel cas necessaires pour la contenance de la sante publique, et n’eust encore permis que de depuis l’une des filles dud. Desplans ayt este aussy inhume solemnellement ainsy qu’auparavant avait esté un sien fils sans aucun soubcon de mal contagion et n’en recogneu en aulcun, que quelques un s’estant prins garde qu’il y estait mort diverses pesonnes, tant chez led. Desplans, que en la maison de Gros Claude Prenel, en la montagne dicte a la Chaux, luy le sieur deposant, lors coeschevin aud. Mortaulx et a la participation de quelqu’aultres aussy eschevins, renvoya maistre Pierre Barbier, chirurgiain en la maison dud. Deplans, pour la visitter, lequel ayant faict rapport aulx sieurs eschevins, qu’il avait tenue en la maison dud. Desplans ja lors decedé, une sienne fille qui estait morte de peste, lequel rapport fut fait en la maison du Sieur Marc Gaulard ou lors estaient ssemblez la majeure part des prodhommes pour communiquer de cette affaire, ou estant a l’instant survenu led. Jean Mercier defendeur et son fils, led.deposant print occasion de se Écontre led. sieur Gaulard pour luy avoir permis l’entree en lad. maison et s’en sortit, et mesme led. jour l’on fit entendre a luy le sieur deposant que iceluy Mercier estait present a la conduite de la fille morte de peste au cimetiere de l’eglise pour son enterrement, quoy qu’il fut este present au rapport, accourut led. deposant au cimetierre pour empescher son inhumation, mais il y arriva trop tard, ne sachant a quelle raison iceluy deffendeur peut pretendre des interests a l’encontre du produisant a cause de lad.contagion, n’ayant jamais veu prattiquer semblable chose ent tel cas ».
Le cinquième témoin est Anthoine MERCIER, de la Grand Ville de Mortaulx, bouchier de sa profession, âgé d’environ soixante et dix ans. Il est parent au quart degré au défendeur ainsi qu’au produisant.
« il estait en ce lieu de Grand Ville de Mortaulx ou il estait venu au marchez, et que l’une de ses filles luy vient treuver et luy dict que le Sieur Mercier ceste part deffendeur l’avait esté demandez en sa maison pour luy dire qu’il deut aller faire la fosse pour enterrer lad. fille au cimetierre dud. Mortaulx et en la place qui leur y appartient, ce qu’il fit et après quoi, luy deposant estant parent a lad. fille alla au devant lorsque l’on l’apportait pour l’inhumer aud. cimetierre, en quoy il se donna garde que plusieurs se plaignaient de ce que l’on l’enterrait ainsi solemnellement, et entre aultres le Sieur Cleriadus Girardot qui disait que lad. fille estait morte de peste; neanmoins le sieur ceste part defendeur assistant aud. enterrement disait que non et qu’elle n’estait morte de ceste maladie, neanmoins il se couvrait le nez avec son mouchoir d’ou le deposant estime que le deffendeur jugeait ou scavait que lad.fille estait decedee de lad. contagion et qu’il n’en estait pas ignorant parcequ’il se couvrait ainsy a eviter le mauvais air du corps de la fille ».
Le sixième témoin est Révérend père Pierre Claude FAUG, supérieur religieux au couvent des révérends pères minimes au Val de Mortaulx, âgé d’environ quarante et un ans.
« est veritable que l’on ne se soubconnait d’aucune peste apres la mort mesme dud. feu Desplans, pour ce que il y eut une grande assemblée pour la benediction de la pierre fondamentale de la chapelle ou eglise dud. couvent ou ceux de Chinnard estaient ainsy que ceux des aultres villages dud. Mortaulx et aultres estrangers et ne parut la contagion aud. val de Mortaulx que trois jours apres la benediction et y avait ja dix sept jours que le feu Desplans estait decedé, qu’est une marque que l’on ne jugeait point que le feu Desplans estait mort de la contagion ».
Le septième témoin est Maître Jacques LOUVRIER, prêtre vicaire domestique en la grande ville de Mortaulx, âgé d’environ trente huit ans.
« il avait esté par quattre diverses fois en les maisons de feu Claude Desplans aux lieu de Chinard et de la Chaux, tant pour confesser iceluy que aultres de ses domestiques, leurs administrer les saints sacrements de l’hostie et de l’extreme onction, sans aucune suspicion de la contagion [É], qu’au commencement la commune oppinion estait que c’estait d’une fiebvre chaude qui courait aud. temps au Val dud. Mortaulx [É], se souvenant neantmoins qu’il y eut un grand bruit lors que l’on enterra au cimetierre dud. Mortaux la derniere des filles dud. Desplans quoy qu’elle ne fut pourtee a l’eglise, sur ce que l’on se doubtait qu’elle estait morte de la peste et dont le Sieur Cleriadus Girardot se serait fasché contre led. sieur deposans, qui luy dit qu’il avait ainsy faict par ordre du Sieur Cure ».
Le neuvième témoin est Anthoine fils de feu Outhenin MERCIER de Chinard, laboureur âgé d’environ cinquante ans (parent a l’une et l’autre des parties par pareil degré).
« se souvient d’avoir este souventes fois en la maison de feu Claude Mercier Desplans père du produisant, pendant la maladie dont il mourut, mesme y estait encore le jour de son deces, selon et tout ainsi que plusieurs aultres, voire led. deffendeur ceste part y estait quasy tourjours a cause de leur particuliere amitie et parantage et disait on communement que lad. maladie estait une fiebvre chaude que avait regne sur le val de Mortaulx [É] sept ou huit mois auparavant »
Le dixième témoine est Pierre fils d’Anthoine MERCIER âgé d’environ trente ans fils du précédent témoin).
Confirme les propos de sont père. C’est lui qui a conduit sur un chariot au cimetière la dernière des filles de Claude Mercier Desplan sur ordre du défendeur, et s’est fait tancer à ce sujet par Cleriadus Girardot.
Le onzième témoin est Pierre fils de feu Claude HUMBERT PRENEL, de Chinard, âgé d’environ soixante quinze ans.
Il précise que led. feu Desplans et sa femme étaien cousins germains.
Le douzième témoin est Pierre GIRARD GUYOT de Chinard, laboureur, âgé d’environ trente ans.
Il déclare qu’il est impossible que le défendeur, le notaire Mercier, ait pu avoir une telle perte pour cause de peste de mille ou douze cent francs , car :
« il est impossible qu’il puisse faire un tel proffit de son mestier de notaire au lieu de Chinard et circonvoisins, qu’en une annee entiere il puisse gagner semblable somme ny beaucoup moindre, car si ainsy estait il serait beaucoup plus commode et riche qu’il nest estimé que des mediocres en bien aud. Chinard ».
Le treizième témoin est François fils de Claude HUMBERT PRENEL de Chinard, laboureur âgé d’environ vingt sept ans.
Le quatorzième est Guillaume fils de Pierre ROUGNON de Cornabey, laboureur, âgé d’environ trente ans.
Le quinzième est Sébastien JEAN ROY de Mortaulx, receveur des sieurs habitants et eschevins dud. Mortaulx.
Il précise que le défendeur n’a été imposé pour :
« le jet jetté an l’an mille six cent trente deux pour l’an mille six cent trente et trois qu’a vingt huit gros, et en l’an mille six cent trente trois pour la presente a trente gros, y ayant des habitants qui sont imposes a trois ou quatre francs ».
Le seisième témoin est honorable Delle VERNIER de Mortaulx, agé d’environ trente six ans.
« se recougnait par le livre des impositions du jet de l’an mille six cent vingt deux qu’iceluy deffendeur ne fut imposé qu’a deux francs que fut le plus gros jetz qu’aurait este jette au val de Mortaulx a raison des cloches qu’il faillut refondre et encore a cause de la milice, ayant mesme recougneu par led. livre qu’il avait en mains [É], qu’il y en avait aud. Chinard qui furent imposes a trente trois francs ».
Le dix-septième est Jean GRAVEL, procureur postulant au siège de Pontarlier, âgé d’environ quarante sept ans.
« pendant six ans il a este amodiateur du scel du ressort de Pontarlier, led. Jean Mercier ne luy a paye pour tout droit de scel des contrats qu’il disait avoir receu qu’environ quatre francs et demy ».
Le dernier témoin est interrogé à Salins, il s’agit de Pierre FRANCOIS, docteur en médecine demeurant à Salins, âgé d’environt quarante ans.
Il se souvient seulement d’avoir rédigé à Pontarlier au mois de juin 1631 une ordonnance pour un particulier de Morteau.
On notera que le personnage principal de cette affaire n’est jamais nommé GUYOT MERCIER DES PLANS, mais seulement MERCIER DES PLANS, forme du patronyme qui s’imposera jusqu’à la fin du dix-huitième siècle.
On notera aussi que le tuteur de Jean François MERCIER DES PLANS est Pierre MERCIER PEGUOT, ce qui confirme la proche parenté de ces deux branches.
Mais revenons à l’apparition de la peste dans le val de Morteau en 1631. Il semble bien que Claude MERCIER DES PLANS l’ait ramenée de Suisse, plus précisément des Verrières, où ils était allé chercher de l’argent qu’on lui devait.
Revenant par son meix de La Chaux, il y amena la contagion. Et enfin de retour à Chinard, il contamina sa famille.
Dans le courant du mois de juin 1631, il perdit deux enfants, puis mourut lui même peu après. Il semblerait que la famille ait cherché à cacher la gravité de la maladie. Trop d’intérêts immédiats étaient sans doute en jeu.
C’est quand une autre des filles mourut début juillet les yeux s’ouvrirent enfin, et que les échevins prirent les mesures nécessaires pour isoler les malades dans des loges.
C’est dans l’une d’elles que mourut Blaise MYOTTE et dans une autre que fut soigné Jean François MERCIER DES PLANS, qui lui survécut.
Le ressentiment de la population contre Claude Mercier des Plans qui avait ramené la peste au pays, devait être grand, et quand le fléau s’éloigna, sans doute avec l’hyver, certains firent leurs comptes et se demandèrent sans doute s’ils ne pouvaient pas se payer sur l’héritage qui était d’importance comme nous allons le voir.
Le compte de la tutelle qu’a exercée Pierre MERCIER DIT PEGOT, a été conservé. Il est daté du onze juillet 1634 est ne contient pas moins de cent cinquante pages.
Il nous apprend que le tuteur a été élu le 19 novembre 1631, soit près de cinq mois après la mort du père, délai inhabituel, mais dû sans doute à la peste qui paralysait toute activité.
L’aisance de Claude MERCIER DES PLANS nous est confirmée; il ne possédait pas moins de cinq meix :
– un meix à Derrière Chatel,
– un meix au Parmey, montagne de Chinard, loué à Guillaume BOILLOD,
– un meix à la Grand Combe, loué à Jacque VAUGNE,
– un meix à la Chaux d’Estalier,
– un meix à Chinard.
Les recettes des locations des meix, rentes, ventes de grain est bétail s’élèvent à 4849 F. Les dépenses s’élèvent à 4428 F, et dans ces « missions » du tuteur, les dépenses pour les différents procès, terminés ou « pendants » tiennent une bonne place.
Au folio 15 V°, est rapportée une rente dûe par Pierre fils de feu Pierre BONZON, au bénéfice de Claude fils de Pierre GUYOT MERCIER, ayeul du pupille. Cette rente établit donc avec certitude l’ascendance de Jean François MERCIER DES PLANS qui fait l’objet de la suite de cette étude.
Jean-François Mercier-des-Plans et sa descendance
C’est dans le meix de Chinard que Jean François MERCIER DES PLANS a fait sa demeurance avec ses deux soeurs Jeanne et Guillauma. Ce sont les trois survivants de la famille avec Clauda femme de Claude BOICHARD de Grand Combe.
Le compte de tutelle nous apprend que Jean François vient de passer l’âge de quatorze ans, il est donc né vers 1620.
Il a la lourde responsabilité de prendre en mains les affaires familiales.
Son tuteur l’a fait instruire, entre autres, 34 gros ont été payés à Jean BOURNEL pour l’avoir enseigné en son « eschole ». Jean François signe d’ailleurs le compte de curatelle.
Arrive alors la guerre de dix ans et Jean François MERCIER DES PLANS va sans doute se réfugier en Suisse avec la majeure parties des habitants du Val.
On peut penser qu’il se marie dès le calme revenu.
Et le 26 juin 1651, est baptisé Claude Joseph MERCIER DES PLANS, fils de Jean François et de Catherine BOILLOD.
Le parrain est Claude BOILLOD, la marraine Guillemette MERCIER DES PLANS.
La marraine est la soeur de Jean François comme le prouve une donation qu’elle fait en 1671.
Cette donation est datée du 29 mai 1671, et est intitulée « Donation par Guillauma fille de feu honorable Claude GUIOT MERCIER DES PLANS de Chinard ».
L’intitulé confirme l’identité des deux patronymes MERCIER DES PLANS et GUIOT MERCIER DES PLANS.
La donataire laisse :
50 F chacun à honorables Jean et Gui BOICHARD, ses neveux;
100F à Anne BOICHARD;
100 F à Charlotte DERMIGNEUX sa petite nièce et filleule,
2000 F à Claude Joseph GUIOT MERCIER DES PLANS son neveu et filleul;
le reste à son frère Jean François.
En 1659 Jean François MERCIER DES PLANS est échevin de Montlebon.
Sa première femme Catherine BOILLOD meurt le 5 mai 1677; or celle-ci, trois ans auparavant, en 1674 a hérité de sa cousine Nicole GAULARD de Morteau d’une rente de 7 F de capitale de 100 F. Dans le testament Catherine BOILLOD est dite femme d’honorable Jean-François MERCIER DES PLANS des Plains de Chinard. Et l’on tient sans doute dans ce lieu dit l’origine du surnom, puis du patronyme.
Jean François MERCIER DES PLANS se remarie avec Jacqua PRENOT DUBOIS qui meurt à son tour le 23 janvier 1689 âgée de soixante dix ans.
Qu’en est-il du patrimoine familial ? En 1683, Jean François MERCIER DES PLANS est encore le plus imposé de Chinard, et pourtant le 3 janvier 1683 honorable Jean François MERCIER DES PLANS et son fils Claude Joseph empruntent 400 livres à Jean MICHEL PARGOT, par devant le notaire Bole.
Encore le 16 septembre 1696, il emprunte conjointement avec son fils Claude Joseph 200 livres aux R.P. Minimes de Sur la Seigne.
Et sans doute meurt-il avant 1700, ayant survécu à la peste, à la guerre de dix ans, et à la conquête par les Français.
Son fils Claude Joseph s’est marié le 22 février 1672 en l’église de Morteau avec Sébastienne fille de Pierre THOMAS THOMAROT de Combe sous Motte. Le cousin germain, Guy BOICHARD, procureur d’office est présent au mariage.
On lui connaît cinq enfants :
1. Claude Hyacinthe né vers 1650 dont il est parlé plus loin.
2. Pierre Joseph, baptisé le 10 janvier 1675, le parrain est Pierre Thomas, sans doute le grand-père maternel, la marraine est Catherine Boillod, la grand-mère paternelle.
Il sera impliqué en 1690 dans une requête en annulation de testament, ayant été témoin le 12 décembre 1688 du testament de Claude GUYOT, alors qu’il lui manquait un mois pour avoir l’âge légal de quatorze ans.
3. Antoine, né vers 1683, mort le 13 février 1761 à 78 ans.
4. Anne Marguerite, baptisée le 5 février 1688,son parrain est Guillaume SIMON VERMOT, sa marraine Anne Marguerite BOBILLIER CHOMONT; elle se mariera par contrat du 23 mai 1715 devant le notaire Vernier avec François fils de Hugue GARNACHE CHAGRIS et Gertrude JEAN JACQUOT des Gras, elle apporte une dot de 600 livres.
5. Pierre Adrien baptisé le 17 octobre 1690, le parrain est Pierre Baptiste DERMIGNEUX, la marraine Adrienne RENAUD DUBOIS.
En 1737 Claude Joseph MERCIER DES PLANS approche de 90 ans et ses fils se disputent déjà ses biens
D’un côté Antoine qui est accusé de s’approprier les biens en intelligence avec son beaufrère François GARNACHE CHAGRIS.
De l’autre ses deux frères Pierre Joseph et Claude-Hyacinthe qui veulent mettre leur père en tutelle.
La mort de Claude Joseph MERCIER DES PLANS le 19 avril 1738 à 88 ans met un terme à cette triste querelle de famille. Il est enterré dans l’église des Minimes de Sur la Seigne et le 6 mai son testament est publié au baillage de Pontarlier.
Finalement Antoine aura eu gain de cause, car il hérite de la maison de Chinard avec le jardin et quatre journaux, des effets et meubles contenus dans la maison, à charge pour lui de payer six cents basses messes et la rente de 1000 francs comtois dûe au Chapitre métropolitain de Besançon.
Pour le surplus, les trois frères, Claude Hyacinthe, Pierre Joseph et Antoine sont hériters chacun pour un tiers.
Antoine renacle d’ailleurs à payer les charges, car le 12 avril 1739 il est assigné au paiement de ces six cents basses messes par les Révérends Pères Minimes de Sur la Seigne.
Chaque messe valant 6 sols 8 deniers, le total fait 200 livres et Antoine n’a payé que 100 livres.
Claude Hyacinthe MERCIER DES PLANS s’était marié par contrat du 31 octobre 1707 devant Vernier notaire avec Etiennette fille de Guillaume FEUVRIER et Jeanne JEANJACQUOT de Derrière le Mont.
La mariée apportait en dot 400 F, un troussel de tout huit, une vache, un habit neuf, un lit de plume assorti d’une couverte piquées et deux oreillers.
Claude Hyacinthe MERCIER DES PLANS aura cinq enfants :
- Claude Joseph, mort en 1785, bourgeois d’Arbois dont le fils Claude-François sera sculpteur à Laon en Picardie.
- Pierrette mariée à Pétré Joly
- Jeanne Françoise née en 1711, mariée en 1741 à Claude Joigneney de Grand’Combe
- Jeanne, née le 25 janvier 1713, son parrain est Etienne VERMOT DES ROCHES, sa marraine Jeanne FEUVRIER.
- Marguerite, née le 3 novembre 1713, son parrain est Pierre VUILLEMIN de Chinard, sa marraine Marguerite CHOUFFE de Derrière le Mont. Décédée le 27 brumaire An 3. Elle épouse le 6 février 1747 à Besançon Claude Joseph CUPILLARD fils de Hugue et de Jeanne Françoise BOURNEL dont elle aura cinq enfants . Quand Marguerite MERCIER DES PLANS meurt le 27 brumaire An 3, quelque temps après avoir été qualifiée de suspecte par les révolutionnaires de Morteau elle est devenue Marguerite DESPLANS et le patronyme a maintenant perdu toute trace de son origine.
- Jean Antoine né en 1725;
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